Murin d'Escalera Myotis escalerai
Depuis déjà les années 90, la population de Murin de Natterer, située dans la région du Conflent, était considérée comme originale par les chiroptérologues locaux (Abdulhak S., Courmont L., Lecoq V., Letscher R., Meunier C., Médard P., Rufray V., obs. pers., GCLR, ENE, Myotis). En effet, le suivi traditionnel des gîtes hypogés en période de mise bas fournissaient régulièrement des données d’essaims importants variant de 30 à 500 individus. Ce fait surprenant, par rapport aux habitudes peu grégaires de l’espèce dans les zones biogéographiques continentales et atlantique de l’Europe, n’avait pas éveillé de soupçons sur le statut particulier de ce Murin jusqu’à la publication d’un récent article (Ibanez & al., 2006).
Cet auteur qui a étudié via des techniques génétiques la diversité cryptique des chauves-souris espagnoles distinguent très clairement trois lignées chez les Murins de Natterer. Parmi ces 3 lignées, il apparaît qu’une lignée est représentée par des Murins type Natterer possédant une écologie particulière puisque strictement troglophile et formant des essaims importants. Il propose de nommer ce taxon Myotis escalerai CABRERA, 1904, décrit dans les environs de Valencia.
La relation entre cette description et les observations réalisées dans les Pyrénées-Orientales apparaît alors évidente, d’autant que le département est frontalier avec l’Espagne. Biogéographiquement, cette hypothèse est également soutenue par la présence dans le département d’espèces à répartition ibérique comme le Cochevis de Thékla (Galerida cristata) ou encore la Couleuvre à collier ibérique (Natrix natrix astreptophora) pour ne citer que ces deux exemples.
C’est en 2008, lors de prospections réalisées par l’association MYOTIS, que Marie-Odile DURAND, Hervé PUIS et Vincent LECOQ découvrent une dizaine de cadavres frais de Murin de Natterer dans une grotte du Conflent. Fort de nos hypothèses, ces cadavres sont envoyés à Allowen EWIN au Muséum National d’Histoire Naturelle pour analyses génétiques (Evin A et al, MNHN, 2008). Celles-ci confirmeront sans aucune ambiguïté l’appartenance de ces murins au taxon Myotis escalerai. Une 34ème espèce de Chiroptère est ainsi identifiée pour la France, dont sa répartition est actuellement circonscrite au département des Pyrénées-Orientales. Elle serait estimée à environ 1000 individus, répartie en 5 gîtes potentiellement identifiés. Aux vues d’observations antérieures deux autres gîtes seraient susceptibles d’en accueillir pareillement. Les observations historiques et actuelles semblent indiquer que le Murin d’escalerai se retrouvent souvent dans les gîtes connus pour abriter le Rhinolophe euryale et le Murin de Capaccini en période estivale ainsi que pour la mise bas.
Aujourd’hui, aucune donnée ne permet de dire si l’espèce est présente dans d’autres départements du Languedoc-Roussillon. Malgré la présence de Murin de Natterer dans les grottes de l’Aude, l’Hérault ou le Gard , aucun essaim important n’a été remarqué à ce jour.
Texte : Vincent Rufray
Retour :
carte Murin d'Escalera